La temporalité en psychothérapie

Quand on entame une psychothérapie pour la première fois, on ne sait pas forcément à quoi s'attendre, on sait juste qu'on veut "aller mieux" mais le reste est souvent plutôt flou...

La souffrance est parfois tellement importante, qu'on espère juste trouver une solution rapide, comme s'il existait une baguette magique pour tout effacer, tout régler, pour devenir quelqu'un d'autre que soi-même et avoir une autre vie...

La psychothérapie est un marathon et non un sprint.

Il n'est pas possible de mettre fin à des années d'un comportement ou de symptômes en quelques semaines. On ne peut pas défaire des habitudes installées depuis 10, 20, 30 ans en 3 ou 8 séances...

Je suis persuadée que dans la psychothérapie, c'est la relation qui "soigne". Le lien entre le psy et le patient est fondamental et il est donc déjà important de prendre le temps de s'installer dans cette relation thérapeutique, d'y créer confiance et sécurité pour pouvoir y déposer librement ses pensées, ses angoisses, ses émotions, ses rêves, ses désirs. Et selon le fonctionnement, le style d'attachement, les difficultés relationnelles de la personne qui consulte, cela peut déjà être long...

Il faut également du temps pour déjouer les mécanismes de défenses et de protection mis en place une partie de notre vie, pour comprendre les schémas répétitifs dans lesquels on est pris (répétitions parfois transgénérationnelles), pour réussir à mettre de la conscience sur notre façon de fonctionner, sur notre rapport au monde et aux autres.

Quand on a réussi à s'observer, à analyser nos difficultés, à mettre de la lumière et du sens sur nos symptômes et nos comportements, il faut encore du temps pour déconstruire, détricoter, défaire, avant de retisser autrement, avant de recréer de nouvelles habitudes, de nouveaux automatismes, une nouvelle manière de voir et de penser le monde.

Ainsi, comme toute activité où l'on veut se sentir à l'aise et compétent, la psychothérapie nécessite du temps et une répétition régulière. Est-ce qu'on pourrait prétendre savoir jouer du piano après 4 cours d'1 heure en 3 mois ? Non, il faut de la pratique régulière, de l'investissement, de l'engagement, des efforts, des essais, des ratés, des réajustements... Eh bien pour aller vers un mieux-être psychique, c'est la même chose.

Je sais que ce que je raconte là n'est ni vendeur ni populaire, mais à l'heure où de plus en plus de pratiques dite thérapeutiques promettent des résultats sensationnels en un temps record, je revendique le besoin de temps et de lenteur pour digérer les aléas de la vie, pour pouvoir en faire quelque chose, et se remettre sur pied.

Je sais parfaitement que lorsqu'on est pris dans la tempête de la souffrance, on donnerait tout pour trouver une solution miracle et c'est bien normal mais c'est justement à nous, professionnels guidés par notre éthique et nos connaissances, de pouvoir dire : "je sais à quel point c'est dur, et le chemin sera sûrement long mais je serai là"plutôt que de profiter de la vulnérabilité des personnes pour promettre monts et merveilles.

Aujourd'hui tout va très vite, nous sommes habitués à avoir tout et tout de suite, avec de moindres efforts, surtout quand on paye pour cela... Malheureusement, la psyché, la psychologie humaine, ne répond pas à cette injonction de l'instantané. Elle est régie par sa propre temporalité et nous n'avons que très peu de contrôle dessus. Est-ce que le psy permet d'accélérer le temps, d'aller plus vite vers le mieux-être ? Peut-être un peu. Mais surtout il permet d'aller plus profondément, et d'ancrer plus solidement les découvertes faites sur soi-même et sur la vie, afin de trouver un équilibre plus durable. Il ne s'agit pas seulement de mettre un pansement sur une plaie béante mais plutôt de chercher à comprendre d'où vient la blessure, de mettre en place ce qui est nécessaire pour la guérison, et ensuite de vérifier le processus de cicatrisation.

Prenez soin de vous et de votre cheminement vers le mieux-être, peu importe le temps qu'il prend.